Par Vincent Carter

Lubumbashi, RDC – Trois organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme, basées à Lubumbashi, ont tiré la sonnette d’alarme concernant la disparition forcée de Kafutshi, chauffeur de l’opposant politique Moïse Katumbi Chapwe. Selon ces ONG, Kafutshi serait détenu au secret par les services de sécurité depuis la nuit du 1er au 2 octobre, en lien avec la réhabilitation de la piste aéroportuaire de Mulonde, un projet initié par Katumbi.

Les organisations concernées – le Centre pour la justice et la réconciliation (CJR), l’Institut de recherche en droits humains (IRDH) et Justicia Asbl – ont exprimé leur profonde inquiétude dans un communiqué publié récemment. Elles dénoncent des pratiques illégales et craignent que le chauffeur ne soit soumis à des actes de torture.

« Les services de l’État ne devraient ni faire disparaître un citoyen congolais, ni le détenir au secret, quelle que soit l’accusation portée contre lui », ont-elles martelé dans leur communiqué.

Contexte de l’affaire

L’affaire trouve ses origines dans les travaux entrepris par Moïse Katumbi pour réhabiliter la piste d’atterrissage de Mulonde, située dans le territoire de Pweto, province du Haut-Katanga. Ce projet s’inscrit, selon les partisans de Katumbi, dans un effort plus vaste visant à rénover l’hôpital du village.

Cependant, l’Autorité de l’aviation civile a vivement réagi, invoquant l’article 183 alinéa 1 de la loi sur l’aviation civile, qui interdit toute modification ou exploitation d’un aérodrome sans autorisation préalable. Cette infraction est passible de 5 à 10 ans de servitude pénale et d’une lourde amende.

Le 1er octobre, en réponse à une correspondance de l’aviation civile, les forces de défense ont procédé à l’interpellation de Kafutshi et à la saisie de son véhicule, suscitant des accusations d’abus de pouvoir de la part des partisans de Katumbi.

Réactions politiques et sociales

La coordination provinciale de la jeunesse du parti Ensemble pour la République au Tanganyika a dénoncé ce qu’elle considère comme une manœuvre politique visant à intimider leur leader. Dans une déclaration, samedi 5 octobre, à Kalemie, les jeunes du parti ont exhorté le gouvernement à « renforcer la cohésion nationale au lieu de s’acharner sur Moïse Katumbi ».

Vianey Muteta, président provincial de la jeunesse du parti, a déclaré que la réhabilitation de la piste de Mulonde fait partie des nombreuses initiatives philanthropiques menées par Katumbi : « Notre président a déjà réalisé des projets similaires à Kibombo, Kasenga et dans son village natal de Kashobwe. Ces actions témoignent de son engagement envers le développement communautaire. »

Un climat politique tendu

Alors que les élections présidentielles de 2023 se sont achevées avec Moïse Katumbi en deuxième position derrière Félix Tshisekedi, l’opposant reste une figure influente sur la scène politique congolaise. Les récents événements, selon ses partisans, traduisent une tentative d’instrumentalisation de la justice pour freiner ses ambitions politiques.

Les ONG et les partisans de Katumbi appellent à une enquête transparente sur l’arrestation de Kafutshi et à la libération immédiate de ce dernier. Ils exhortent également les autorités à respecter l’État de droit et à garantir les libertés fondamentales des citoyens.

Cette affaire, devenue un point de crispation politique et sociale, pose des questions sur l’indépendance des institutions et la gestion des voix dissidentes en République démocratique du Congo.